09/12/1531
<216 recto>
Mandement de placet et
licence a Michel Le Bouteiller
de
presenter par devant les juges de Rennes et
[?chacun?]
certaines lettres de grace et remission de luy impetrees
en France ou moys de
novembre dernier dont la
teneur ensuilt.
[1] Francois, par la grace de dieu, roy de France, pere legitime
[2] administrateur et ususfructuaire de biens de
notre tres cher et
[3] tres ame filz le dauphin duc
et seigneur
proprietaire
[4] des pays et duché de Bretaigne, savoir faisons a tous
[5] present et a venir, nous avoir receu l'humble
supplicacion
[6] de Michel Le Bouteiller, jeune
gentilhomme, capitaine des ville et
[7] chastel de Chastillon en Vandelays,
apartenant a
notre cher et
[8] amé cousin, le comte de Laval,
Contenant que au moien de ce que
[9] Jehan Soullaige apres
plusieurs crimes et delictz
par luy
[10] commis au pays de Normandie, pour eviter la pugnicion
[11] diceulx, se soit retiré tant en la ville et territoire
[12] de
Saint Aubin du Cormier que
aultres lieux des lymites
[13] de noz pays
et duché de Bretaigne faisant
et continuant
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[14] tant luy
que Pierres Soullaige, son
frere,
avecques leurs alyez
[15] et
complixes, pilleries, volleries, raps, incidiacions
*
[16] et autres crimes
et delictz.
Entre autres, ainsi
que le
Sr de
[17] Chautdebeuf,
beaufrere dudit suppliant, s'en alloit avec
[18] deux de ses
seurs et leurs gens au lieu et maison
[19] de Rovel
appartenant au
beaufrere dudit
Sr dudit Chautdebeuf
[20] iceulx Soullaiges avoient destroussé
par insidiacion,
[21] force
et violence aux gens
et serviteurs dudit Sr du
[22] Chautdebeuf, ung arbalastre
et ung oyseau ;
[23] avoient aussi prins, ravy
et pillé en la
[24] maison d'une pouvre
femme, veufve,
demeurant
[25] en la
parroisse de
Saint Jehan sur Coynon,
certaine quantité
[26] de lin et chanvre, ung poillon darrain
et autres
[27] biens, rompu huches
et coffres estans en
ladite
[28] maison ; faisoient
ordinairement ports d'armes, exceix,
[29] forces,
violence, ravisseurs de filles
et femmes,
[30] insidiacions et agressions de chemyns, ainsi
[31] que faict encores de
present ledit Jehan Soullaige, ses
[32] alliez
et complixes, pour lesquelz exceix, prinse
[33] de corps avoit esté decretee
contre ledit Jehan
[34] Soullaige par le
seneschal de
Saint Aubin en Cormier
[35] laquelle n'avoit peu
estre executee.
Et durant
[36] le temps que
lesdits Soullaiges faisoient
lesdits
[37] insidiacions, portz d'armes
et volleries, nous
[38] estans hors de
notre royaulme et que par
[39] feue
notre tres chere et tres ame dame et
[40] mere avoit esté commandé a tous noz subgectz
[41] prandre au corps tous gens
faisans assemblemens,
[42] exceix, forces
et viollence,
ledit supplians qui lors
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[43] estoit aagé de dix neuf ans ou
environ, ainsi qu'il
[44] ouyrit messe le
jour Saint Estienne en l'
eglise parroissiale
[45] de Mezieres, se vint adresser a luy ung
nommé Thomas
[46] Chautoux, filz du methayer
dudit Sr de Chautdebeuf,
[47] qui luy dist que
ledit Sr de Chautdebeuf avoit esté
[48] adverty
que lesdits Soullaiges estoient celluy
jour venuz
[49] du pays de Normandie
audit lieu de Saint Aubin en
[50] Cormier,
faisans et continuans
leur portz d'armes, exceix,
[51] forces
et violence et qu'il les convenoit aller prandre.
[52] A ceste
cause ledit Sr de Chautdebeuf
ledit suppliant
[53] et quatre ou cinq autres se transporterent
audit lieu de
[54] Saint Aubin qui estoit distant du lieu dont ilz
[55] partirent comme de demy lieux ou environ, portans
leurs
[56] espees et l'un de ceulx de
leur compaignie une rondelle
[57] pour la seureté de
leurs personnes,
pour ce que
lesdits Soulages
[58] estoient
tousiours acompaignez
et embastonnez. Et en
leur
[59] chemyn, trouverent Francois Freaux
et deux ou troys
[60] autres et envoyerent l'un de ceulx estant en leur
[61] compaignie,
nommé Georges Freal, dit Johannet
[62] veoir si
lesdits Soullaiges estoient
audit lieu de
[63] Saint Aubin, qui leur rapporta
que ouy,
et que en
[64] la maison ou ilz estoient, avoit une hacquebute sur
[65] la table, ou ilz se transporterent
et entrans en
ladite
[66] maison ou estoient
lesdits Jehan
et Pierres Soulaiges
[67] ayans
leurs espees nues, aulcuns de la compaignie
[68] disdrent
pour leur donner craincte :
« Prenez ! Tuez ! » Mes
[69] tout incontinent,
lesdits Soulaiges tirerent
leurs
[70] espees, ruerent
et frapperent sur icelluy
Sr de Chautdebeuf
[71] et ceulx de sa
compaignie dont
ledit suppliant fut fort
[72] griesvement blessé en l'un de ses braz dont il demeura
[73] plus de troys moys sans son ayde. Lequel
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[74] soy sentant ainsi
grefvement mutillé, commence a crier :
[75] « Tuez ! Tuez-les ! » Aulcuns prindrent en
ladite maison
[76] une perche de boy, une pertuzane, ung dart et
[77] une hacquebute, ruerent
et frapperent sur
lesdits Soulages,
[78] gecterent
contre eulx pychers et chandeliers
et vesselle
[79] et les misrent hors de
ladite maison sur le pavé
[80] devant la maison du
lieutenant dudit Saint Aubin
auquel
[81] ilz disdrent
qu'il les fist mectre en prinson
[82] et qu'il en fist justice ; ce qu'il differa
pour ce que
[83] ilz estoient blessez
et pour ce que
ledit suppliant et autres
[84] furent arrestez. Ilz ne obeyrent
audit arrest,
[85] mais se absenterent et s'en allerent les aulcuns
[86] d'eulx en
ladite maison ou avoit esté
ledit debat
[87] ou ilz prindrent
et amasserent les espees qui
[88] estoient cheutes en la place durant le
conflict
[89] et debat : une pertuzanne, ung dart
et une
haquebute,
[90] apartenant ausdits Soulages. La nuyt
ensuivant duquel
[91] debat,
ledit Pierres Soullaiges au moien des
[92] coups
par luy receuz
audit debat auquel
ledit
[93] suppliant ne toucha, ne frappa, mes fut blessé
[94] grefvement des le
commencement comme dit est, alla
[95] de vie a trespas.
Pour occasion duquel cas
ledit suppliant
[96] doubtant
rigueur de justice s'est
dempuis tenu
[97] absent. Nous
humblement requerant que actendu
[98] la jeunesse ou il estoit lors que en soy
[99] cuydant employer a la prinse
desdits Soulages,
[100] gens de maulvaise
et perverse vie, il pensoit
[101] bien
fere, ainsi qu'il avoit esté ordonné
par notredite
[102] dame et mere, que en tous
autres cas, il est bien
[103] famé et
renommé sans jamais
avoir esté actainct ne
[104] convaincu d'aulcun
autre villain cas, blasme ou
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[105] reproche, il nous plaire luy
impartir noz grace et
[106] misericorde. Pour ce est et que nous ces choses
[107] considerees voulues misericorde preferer a rigueur
[108] de justice
audit suppliant avons remis, quicté
et pardonné
[109] et
par ces presentes de
notre grace
especial, plaine
[110] puissance et anctiere, remectons, quictons
et pardonnons
[111] le faict
et cas
dessusdit avecques toute peine, offense
[112] et amende corporelle, criminelle
et civille en quoy
[113] pour occasion dudit cas, il
pouvroit estre encouru
[114] envers nous justice en mectant au neant
[115] tous aiournemens, desfaulx,
sentences, appeaulx, ban,
[116] bannissement,
proces,
procedeures et tout ce
generallement
[117] qui
pour occasion dudit cas s'en
seroit ou
pourroit
[118] estre contre luy ensuyvy et de
notre plus ample grace
[119] l'avons remis
et restitué, remectons
et restituons
[120] a sa bonne fame et
renommee au pays et a ses
[121] biens non
confisquez, satisfacion
fecte a
partir civillement
[122] tant
seullement si
fecte n'est et sur ce imposons
silence
[123] perpetuel a
notre procureur present et a venir et a tous
[124] autres. Si donnons en
mandement par cesdits presentes aux
seneschal ,
[125] alloué et
lieutenant de
Rennes pour ce que
ledit cas est avenu
[126] en
ladite senneschaussee et a tous noz
autres justiciers
[127] et officiers
presentz et avenir
et a
chacun d'eulx
et comme
[128] a luy
apartiendra que de noz
presentes grace,
[129] quictance, remission
et pardon, ilz fucent, sousfrent
[130] et laissent
ledit suppliant jouyr
et user
plainement
[131] et
paisiblement sans
pour occasion dudit cas luy
[132] mectre ou donner ne sousfrir estre faict,
[133] mis ou donné ores ne
pour le temps a venir
[134] en corps ne en biens aulcun arrest
destourbier
[135] ne
empeschement lequel si faict, mis
<218 verso>
[136] ou donné luy avoit esté ou estoit, ilz luy
[137] mectent ou facent mectre
incontinent et sans
[138] delay a plaine
et entiere
delivrance et affin
que
[139] ce soit chose ferme
etestabli a
tousiours, nous
[140] avons faict mectre
notre seel a
cesdites presentes
[141] sauf en
autres choses
come dit, et l'aultruy
[142] en toutes. Donné a La Fere en Pycardie ou
[143] moys de
novembre, l'an de grace mil
[144] cinq cens trante ung et de
notre regne
[145] le dix septme. Ainsi signé sur le reply :
[146] par le roy, pere legitime
administrateur
[147] et ususfructuaire
dessurdit, a la relacion
[148] du conseil, F. Deslandes ; et seellé de cire
[149] en laz de soye rouge et vert. Et est
escript
[150] sur
ledit reply au bout dicelluy : visa ; et plus
[151] bas : contentor, Deslandes ; et sur le dos
[152] en l'endroit du laczet : regestrata.
Pelerin