11 janvier 1530 [11/01/31]
<3 verso>
Remission pour Jehan Guilloton, la
veriffication du caict le sennechal de
Conq.
[1] Francoys,
etc, savoir faisons a tous
presens et
[2] a venir, nous avoir receu l'humble
supplicacion et
[3] requeste des parens
et amys consanguins de
notre
[4] subgect Jehan Guilloton, simple homme laboureur de
[5] terre, natiff
et demourant en la paroisse de Nevez
[6] ou diocese de Cornouaille, soulz
notre juridicion de
[7] Concq,
Contenant que ou moys de decembre derroin,
[8] jour de dimanche
et quequesoit puis deux moys
[9] derroins, longtemps apres que le dernyer service
[10] dudit lieu fut achevé, ledit Guilloton estant lors au
[11] bourg dudit Nevez en la
compaignie de deux ou
[12] troys autres en une taverne a boyre et menger
[13] et dansans de quelzques
leurs afferes particulieres,
<4 recto>
[14] sans
aucune intencion de mal
fere, ne meslice a aultrui, se
[15] trouva sur
ledit escot, sans
avoir esté appellé, ung nommé
[16] Loys Pasquou qui de tout son temps esté querelleux homme et
[17] debatiff, et coustumier de prandre debatz et querelles des
[18] demourans en icelle paroisse et autres, et d'estre injure
[19] et batu
pour faire cater
*, vexer
et travailler les pouvres
[20] gens en proces
pour en
avoir l'amande et
pour ce
faire cherchoit
[21] leurs discoussions. Et en continuant, lors, comancea
[22] a menacer ledit Guilloton de le
faire citer
*, vexer et
[23] tourmenter. Et ung an avant ou envyron, ledit Guilloton
[24] voyant que ledit Pasquou s'estoit trouvé une autre foy sur
[25] son escot et buvoit grandement, injurit
et prins grosse
[26] querelle contre luy sans aucune occasion
et d'avoir
[27] menaces de le tuer, ayant ung couteau tiré
pour devoir
[28] l'oultraiger ce que il eust fait si par les gens
[29] illecq assistans ne eust esté impesché. Et craignant
[30] que ledit Pasquou se fust rendu sur
sondit escot
pour encore
[31] prendre
querelle avecq luy
et qu'il eust
perseveré en sa
[32] mauvaisetee et
malveillance contre luy, luy dist
[33] ledit Guilleton telles ou semblables
parolles :
« Que
[34] faiz-tu sur notre escot ? Nous avons ycy affere ; tu n'es
[35] point demandé icy. » Sur quoy ledit Pasquou
[36] commancea a menacer ledit Guilleton et se gecta
[37] sur ung
autre escot en icelle maison et
commenca
[38] a iryter ceulx qui y estoint, tendant estre injurié
[39] par quelque ung deux
pour le
faire citer
* l'amande.
[40] Et entre aultres
parolles, dist a ung
prebtre qui y estoit,
[41] qu'il n'y avoit gueres qu'il avoit faict aller ung
[42] prebtre a Rome et que, s'il le hastoit beaucoup, il le
[43] pourchasseroit de sorte qui luy
commendroit y aller.
[44] Et ce voyant
ledit Guilloton et que
ledit Pasquou
[45] irritoit tous ceulx qui estoint en
ladite maison, dist
[46] a Silvestre Guilleton, tavernier tenant vin en ladite
[47] maison a
vendre, et a ung sien frere
nommé Guillaume Guilleton,
[48] cousins
dudit Jehan Guilloton, telles ou semblables
parolles :
[49] « Voyez ung homme bien querelleux et debatiff qui
[50] serche querelle a tous ceulx qui sont ceans, et perturbe
[51] les escotz et moleste les gens estans en une taverne.
[52] Nous ne povons avoir pacience avecq luy, je seroys
[53] content poyer une quarte de vin pour le voir mestre
[54] hors de ceans. » Auquel Jehan Guillonton,
lesdits
[55] Silvestre et Guillaume Guilloton respondirent qu'il estoit
[56] mauvais garson et qu'ilz eussent voullu qu'il eust esté hors
[57] ladite maison, mains qu'ilz n'osoint le mestre hors
[58] de peur qu'il ne les trascast en proces.
<4 verso>
[59] Et sur ce demoura
ledit Jehan Guilloton a danser et
[60] boire a
sondit escot. Et ledit Pascou qui
dudit propos avoit
[61] esté mary,
envyron demye heure de nuyct s'absenta hors
[62] ladite maison menaceant ledit Jehan Guilloton de l'oultraiger.
[63] Neanmoins tout ce, demoura
ledit Guilloton en
ladite taverne,
[64] a
sondit escot, a boire et y beut tellement qu'il s'emporta et
[65] perdit les cens et entendement quasi de raison. Et
[66] quelque temps apres, envyron deux heures de nuyct
ledit Jehan
[67] et Silvestre et Guillaume Guilloton sortirent dicelle taverne
[68] et prindrent chemyn a aller droit a leurs maysons ayans
[69] chacun deulx ung baston de boys en leurs mains, et sur
leur
[70] chemyn, trouverent ledit Pascou lequel, ainsi que leur
[71] sembloit, les guetoit, pretant qu'il y avoit assez long
[72] temps qu'il avoit sorty hors
ladite taverne, menaceant
ledit
[73] Jehan Guilloton
comme dict est, et mesmes
pour ce qu'il gardoit
[74] le chemyn droit a aller a leurs maisons qui n'estoit le
[75] chemyn d'aller a la maison
dudit Pascou, ains estoit son
[76] chemyn par l'autre costé du bourg. Quoy voyant
[77] ledit Jehan Guilloton qui estoit emboité de vin, se craignant
[78] dudit Pascou qui estoit dangereux
et coustumier de
[79] frapper du cousteau qu'il portoit tousiours a luy,
[80] luy bailla sur les jambes ung coup du baston de
[81] boys qu'il portoit en sa main, tellement qu'il tomba a
[82] terre sans touteffoiz
ledit Pascou fust mort
dudit
[83] coup, s'il n'eust eu
autre chose et apres,
lesdits Silvestre
[84] et
Guillaume Guilloton lui baillerent
chacun son coups des
[85] bastons de boys qu'ils avoint en leurs mains. Et sur ce
[86] s'en allerent
lesdits Guillaume Guilleton, Jehan Guilleton a leurs
[87] maisons et y demoura
ledit Silvestre auquel
ledit Jehan
[88] dist qu'il ne le tuast pas. Et le lendemain au matin
[89] qui estoit le
jour de marché de la ville
dudit lieu
[90] de Concq, s'en alla
ledit Jehan Guilleton
audit marché ou
[91] luy fut dict que
ledit Pascou estoit mort. A raison
[92] dudit cas, fut
ledit Jehan Guilloton prins par la justice
[93] et
juridicion dudit Concq et mis en prison ou il est
[94] encores detenu ; et a l'interrogacion qui luy fut faicte
[95] par la justice
dudit cas, sans aucune contrainte, torture,
[96] ni fatigue de justice, de sa franche et liberalle volonte,
[97] congneut et confessa la verité du faict tel que dict
[98] est. Si nous ont
lesdits supplians remonstré que
[99] ledit Jehan Guilloton est pouvre
homme, simple laboureur
[100] de terre, chargé de
femme et
quatre petitz ensfens, quelz de
[101] soy mesmes ne sauroint vivre obstant qu'ilz soit
[102] petitz
et adolescens, et que de tout temps
auparavant
<5 recto>
[103] ledit cas,
ledit Jehan Guilloton a esté
homme de bonne vie, de
[104] conversacion, sans aucune autre noyse, ne querelle
[105] et sans jamais
avoir esté reprins d'aucun autre cas digne
[106] de
reproche. Touteffoiz doubtent
lesdits supplians que, sans
[107] y avoir esgard, nos officiers dessurs les lieux,
[108] veillent proceder contre
ledit Jehan Guilloton a rigueur
[109] de justice. Nous supplians qu'il nous plait
dudit cas
[110] impartir et octroyer
audit Jehan Guilloton nos
lettres
[111] de grace, remission
et pardon tres
humblement le nous
[112] requerans. Et pourquoy nous
etc
Blanchet