Registre B34 Lettre n° 36

26/06/1532

<108 recto>
Mandement de placet, congié* et [?par contumace?]
a Yvon Havys de presenter aux prochains
generaulx plectz de la court de Ploermel
par devant le senneschal dudit lieu ses lettres
de grace et remission pour le cas et homicide
decleré par icelles obtenues par la joyeusse et
nouvelle antree de la Royne en la
ville de Ponteau de Mer desquelles lettres
de remission la teneur ensuit ledit placeait
du xxixe jour de ce moys qu'est
[??]
[1]
Leonor par la grace de dieu, royne de France, savoir faisons, a tous presens
[2]
et advenir comme suyvant les droictz, arretez et privilleges a nous
[3]
donnez et octroyez par monseigneur le Roy et ce que noz predecesseresses
[4]
roynes ont acoustumé fere en ce royaume de France a notre nouvel
[5]
advenement et premiere antree qu'avons fecte en la ville de Ponteau
[6]
de Mer, avons faict ouvrir les prisons de ladite ville et delivrez les
[7]
prisonniers y estans detenuz pour leur fere grasse, remission et
[8]
pardon des cas par eulx commis sellon nosdits droitz. Entre lesquelz
[9]
y estoit ung nommé Yvon Havys, pouvre home chargé de femme
[10]
et enffans, de mestier de cousturier, aagé de trante deux ans ou
[11]
envyron pour le faict et cas cy apres declairé. Ces assavoir
[12]
que le quatriesme jour de septembre derroin passé, ledit supliant se
[13]
partit du lieu et villaige de Plumyeu pour s'en aller ou lieu et
[14]
bourg de La Trinité ou le marché estoit cedit jour pour aucunes ses
[15]
affaires. Et après qu'il eut parlé a quelques gens a qui y avoit
[16]
affaire, s'en alla ledit supliant en la maison de Mathurin
[17]
Leroy, tavernier dudit lieu a present deffunct pour parler a ung
[18]
nommé Jehan de La Mothe de Bandifer pour lequel il debvoit
[19]
fere unes chausses et pourpoint. Et apres qu'il fut en ladite
[20]
maison, entré en la chambre ou estoit icelluy de La Mothe et
[21]
parla a luy ; et ce faict, sortit icelluy supliant de la chambre
[22]
et entra en ung cabaret* pres la cuisine de ladite maison
[23]
ou estoint a table Raoul Robillet, Georges Marcade et
[24]
ung nommé de Largeal, entre lesquels il semble audit
[25]
suppliant y avoir quelques parolles. Et pour iceulx accorder,
[26]
se assist icelluy supliant a table avec les dessusdits
[27]
leur disant qu'il failloit qu'il les accordast ;
[28]
lesquelz dirent audit supliant qu'il ne seroit point <134 verso>
[29]
leur juge et qu'ilz ne et qu'ilz ne[sic] le sercherent point. Et alors ledit
[30]
supliant qui avoyt esgairé une trompe de laquelle on joue de la bousche
[31]
laquelle il avoyt mise sur la table laquelle avoyt esté prinste
[32]
par aucuns de ladite compaignye, jura par le sancg dieu que si on ne luy
[33]
rendoit sadite trompe qu'il bapteroit icelluy Marcade et que c'estoit luy
[34]
qui l'avoyt prinste. Et voyant icelluy Leroy dist audit supliant que c'estoit
[35]
mal faict de jurer qui s'en allast et qu'il faisoit ennuy a ses
[36]
gens et print ladite trompe de l'un desdits merciers et la rendit
[37]
audit supliant lequel supliant luy dist, jurant le nom de dieu qu'il
[38]
ne s'en iroyt point de la et qu'il n'estoit point avec luy d'escot
[39]
et qu'il n'estoit que ung questoux et que cependant qu'il auroit
[40]
argent qu'il buroit en sa maison en despit de luy. Et
[41]
ce faict, se partit dillec ledit supliant pour soy sortyr dehors,
[42]
lequel remonstra en sortant de ladite chambre icelluy Leroy deffunct
[43]
qui venoyt droict contre luy tant estchauffé craignant icelluy
[44]
suppliant que ledit deffunct qui, come dit est, venoit droit contre luy, le
[45]
voulsust oultraiger come il est a presumer actendu les parolles
[46]
qu'ilz avoynt eu auparavant et aussi qu'il s'approcha pres de
[47]
luy craignant qu'il ne le saesist au corps pour dommaiger
[48]
sa personne, tira ung petit cousteau qu'il avoit acoustumé de
[49]
porter duquel il donna ung coup en l'endroict de la poictrine
[50]
audit Leroy au moyen duquel coup ledit Leroy par faulte de bon
[51]
apareil ou autrement seroit allé de vie a trespas. Et depuys
[52]
ledit supliant auroit guaigné franchise en laquelle il
[53]
auroit porté ledit cousteau duquel il avoyt faict
[54]
ledit coup pour raison duquel cas ledit supliant craignant
[55]
rigueur de justice se seroit absenté du pays ouquel ne
[56]
ailleurs en ce royaume il n'oseroit bonnement converser
[57]
ni demourer si noz grace, remission et pardon ne luy estoint
[58]
sur ce impartiz. En nous humblement requerant que a tout ce
[59]
que dit est et que en tous autres cas il est bien famé et renommé
[60]
sans jamays avoir esté actaint ne convaincu d'aucun autre
[61]
villain cas, blasme ou repproche, nous luy veillons en usant
[62]
de nosdits droictz, privilleges et auctoritez sur ce luy impartir noz
[63]
grace, pardon , misericorde et remission. Pour quoy
[64]
nous ces choses considérées, voullans misericorde preferrer
[65]
a rigueur de justice, avons audit supliant usant de nosdits
[66]
droicts, quicté, remys et pardonné, quictons, remectons et
[67]
pardonnons le faict et cas dessusdits avec toute peine, amande
[68]
et offanse corporelle, criminelle et civille en quoy pour
[69]
occasion dudit cas, il pouroit estre encoru envers mondit Seigneur le
[70]
Roy et justice en mectant au neant tous adjournemens,
[71]
deffaulx, sentence, appeaulx, ban, bannissemens, proces, procedures
[72]
et tout ce que pour occasion desdits cas s'en pouroit estre contre
[73]
ledit supliant ensuyvi. Et avec ce l'avons remis et
[74]
restitué, remectons et restituons par ces presentes a sa
[75]
bonne fame et renommee aux pays et a ses biens
[76]
non confisquez, satisfaction fecte a partir civillement <135 recto>
[77]
tant seullement si fecte n'est. Et sur ce avons imposé et
[78]
imposons sillence perpetuel au procureur general de mondit seigneur le Roy,
[79]
present et advenir, et a tous
[80]
autres. Si donnons en mandement par ces presentes au bailly
[81]
de Ploermel ou autre prochain jugement royal du lieu ou ledit cas
[82]
a esté commis ou a son lieutenant, et a tous les autres justiciers,
[83]
officiers et subgectz de mondit seigneur le Roy, pere legitime
[84]
et administrateur et usufructuaire des biens de notre tres cher
[85]
et tré asmé filz le daulphin duc et seigneur propriétaire
[86]
des pays et duché de Bretaigne ou a leurs lieutenants
[87]
et a chacun d'eulx si come a luy apartiendra que de noz
[88]
presens grace, quictance, remission et pardon et de tout
[89]
l'effect et contenu sesdites presentes ilz facent, seuffrent
[90]
et laissent ledit supliant jouyr et user plainement et
[91]
paisiblement sans pour occasion desdits cas luy fere mectre
[92]
ou donner ne souffrir estre faict, mis ou donné ores ne
[93]
pour le temps advenir aucun arest destourbier ou empeschement
[94]
en corps ne en biens en quelque maniere que ce soit, ainsi
[95]
si son corps ou aucun de ses biens sont ou estoint pour ce prins,
[96]
saisiz, arrestez ou autrement empeschez, mectez les luy
[97]
ou fectes mectre incontinent et sans delay a plaine delivrance
[98]
et au premier estat et deu. Car tel est notre plaisir. Et
[99]
affin que ce soyt chose ferme et establi a tousiours, nous
[100]
avons faict mectre notre seel a sesdites presentes, sauff
[101]
en autres choses le droict de mondit seigneur le Roy, le notre
[102]
et l'autruy en toutes. Donné audit Ponteau de Mer ou moys
[103]
de mars l'an de grace mil cinq cens trante ung.
[104]
Ainsi signé sur le reply par la royne, Lemoynne,
[105]
et de l'autre costé sus ledit reply, visa. Et sellé de cire
[106]
rouge a double queue.

Morice