24/05/1531
<75 verso>
Remission pour Jehan Lechere, pouvre
homme de labeur, demourant en la
parroisse
de Sainct Gille en l'evesché de Rennes, de homicide
commis en la personne de Jehanne de Trelan,
dont la teneur ensuilt cy-apres.
[1] Francois,
etc, a tous
presens et a venir, salut.
Savoir
[2] faisons, nous avoir receu l'humble
supplicacion
[3] et requeste des parens et amys consanguins de Jehan
[4] Lechere, pouvre
homme de
labeur demourant en la
parroisse
[5] de Sainct Gille en l'evesché de Rennes,
Contenant
[6] que puix dix ans
deroins,
ledit Lechere a esté
[7] conjoinct
parr mariaige a une
femme appellee
[8] Jehanne de Trellan qui autresfoiz avoit esté
[9] mariee en
notre ville de Rennes a ung
nommé
[10] Maillart, esperant qu'elle euste esté de
[11] bonne et honneste
conversacion, et depuix les
[12] espousailles
dudit Lechere, celle Jehanne de Trelain
[13] a faict coustume de boire vin par exceix, a occasion
[14] de quoy a esté bruyt qu'elle estoit prodigue
[15] de son honneur et corps et
pour obvier
* a plus
[16] grant inconvenient,
ledit Lechere
commancza
[17] a
fere faict et tenir taverne de vin d'Anjou et
[18] breton ou bourg
dudit Sainct Gille. Si
[?estions?]
[19] que envyron le moys de janvier dernier, ung
[20] nommé Jehan Bloysz et Michelle Gaulier, sa
[21] femme, se trouverent en la maison
desdits Lechere
[22] et sa
femme pour y boyre et prandre leur
reffection
[23] envyron disner, en laquelle maison ilz
[24] demourrerent jucques au soupper et y
[25] soupperent en la
compaignie desdits Lechere
et sa
femme
[26] et apres leur souppé, celuy prya
ledit Bloys
[27] et sa
femme de demourrer a couscher en
leursdite
[28] maison et qu'ilz leur feroint bonne
chere
<76 recto>
[29] ce qu'ilz ne voullurent
[??], s'en allerent
[30] et apres s'en estre allez,
ladite Jehanne de Trelan
[31] et une sienne
chambriere dirent voulloir aller
[32] haulser le vin qui estoit en broche et print
[33] ladite chambriere une chandelle alumee et apres
[34] avoir esté, celle Jehanne de Trelan et
sadite
[35] chambriere quelques temps au celier ou estoit
[36] ledit vin qui est au
derriere ou ledit Lechere
estoit
[37] demourant qui voyant que
lesdites de Trelan
[38] et
sadite chambriere estoint trop longuement
[39] audit celier
comme luy sembloit, appella
ladite
[40] Jehanne de Trelan luy demandant qu'elle
[41] faisoit la, a quoy
ladite chambriere respondit
[42] qu'ilz levoint le vin, interrogea celuy Lechere
[43] celle
chambriere si elle disoit a bon escient.
[44] Et lors
ledit Lechere doubtant
que ladite de Trelan
[45] eust usé de son plaisir
comme il avoit esté averty,
[46] appella icelle de Trelan :
« Putain ! Prestresse ! » luy
[47] disant qu'elle tenoit le bourdeau en sa maison.
[48] Et print celuy Lechere ung baston de boys
[49] qu'il trouva comme de la longueur de quatre
[50] piedz et demy, et de grosseur a plain poing,
[51] et frappa sur le chappeau de l'uys
dudit celier ou
[52] estoint
lesdites de Trelan et
chambriere, et lors
ladite
[53] chambriere s'enfuyt par l'huys devant de
ladite
[54] maison et estaignit sa chandelle qu'elle tenoit
[55] entre ses mains. Et apres ce et l'huys dicelle
[56] maison fermé, celle de Trelan sortit
dudit celier
[57] demandant
audit Lechere qu'il avoit et qu'ilz luy
[58] avoint faict et lors
ledit Lechere dist a icelle
[59] de Trelan
que c'estoit le train d'une putain, a quoy
[60] icelle de Trelan respondit qu'il
[?prenseist?] que
[61] ainsi fust. Voyant laquelle responce, celuy
[62] Lechere, irrité et emboité de vin qu'il avoit prins
<76 verso>
[63] par exceix, dist a
ladite de Trelan qu'elle ne
[64] coucheroit en sa maison et celle le Trelan
rudement luy
[65] respondit que se feroit si on ne la mectoit
[66] dehors par justice et
ledit Lechere dist qu'il
[67] n'y coucheroit doncques pas, a quoy
ladite
[68] de Trelan
[?persecevant?] en sa
[?procurité?], dist
audit
[69] Lechere qu'il coucheroit ou il luy plairoit
[70] disant
audit Lechere qu'il la tuast et la
[71] rendist a ses amys et a l'allouee de
[72] Rennes. Et sur ce continuant en
parrolles de
[73] rigueur et celuy Lechere tout couroucé donna
[74] dudit baston qu'il tenoit, ung coup en la
[75] teste de
ladite de Trelan vers l'oreille de sorte
[76] que ledit baston en rompit et esclia
* et diceluy,
[77] par faulte de bon pensement ont esté
[78] lesdits supplians arrectez que
ladite de Trelan alla
[79] en celle nuyct de vie a trespas. A raison duquel
[80] cas, craignant
ledit Lechere rigueur de justice,
[81] s'est rendu fuitif et n'oseroit se trouver
[82] en
cedit pays, si nous ont
lesdits supplians
[83] remonstré que, auparavant
ledit cas, ainsi de
[84] mallefortune avenu, il estoit reputé
homme
[85] de bien, de bon rest et gouvernement, bien
[86] vivant de son faict de labouraige, doulx et
[87] paisible, sans jamais avoir esté accusé,
[88] actainct ne reprouché d'aucun mauvaix cas
[89] digne de
reproche fors le
dessurdit. Nous
[90] supplians qu'il nous plaise a ce que dessus
[91] avoir esgard et
dudit cas impartir et
[92] octroyer
audit Lechere noz
lettres de grace,
[93] remission et
parrdon tres humblement nous requerans. Pourquoy nous,
etc, la
verificacion
[94] a la court de Rennes.
Derien